Le voyage du Pape en Grèce et sa rencontre avec la communauté jésuite d’Athènes

Du 2 au 6 décembre, le pape François se rendra à Chypre puis en Grèce. Le samedi 4 décembre, en fin de journée, il rencontrera les jésuites de Grèce. Le P. Pierre Salembier sj, Supérieur de la communauté jésuite d’Athènes, évoque dans cette interview les enjeux de ce voyage du Pape. - Source : Interview réalisée avec le P. Pierre Salembier sj,

Pourquoi le pape a-t-il décidé de revenir en Grèce ?

Le pape François a décidé de se rendre à Chypre puis en Grèce car il aime les périphéries. Il a affiché deux buts à sa venue : le soucis d’alerter à nouveau sur la question des réfugiés et le désir de faire avancer la cause de l’œcuménisme.

En quoi consiste sa volonté de faire avancer l’œcuménisme ?

L’œcuménisme consiste à avancer vers l’unité. Mais attention, on a longtemps pensé dans l’Eglise catholique que l’unité se ferait par assimilation des autres Eglises à l’Eglise catholique. Cette perspective est tout à fait terminée. Aujourd’hui, l’œcuménisme consiste à prendre conscience que chaque Eglise a sa propre richesse dans sa manière de comprendre et de vivre le christianisme et de s’apprécier mutuellement.

On en est encore loin en Grèce. En effet, même si le patriarche de Constantinople est en relation amicale avec le pape François, l’Eglise orthodoxe grecque est encore loin d’être dans une attitude de bienveillance et de dialogue avec l’Eglise catholique.

Que représente la communauté catholique en Grèce ?

En Grèce, il y a autour de 200 000 catholiques, dont 4/5e sont des étrangers. C’est-à-dire que les catholiques grecques eux-mêmes ne seraient environ que 40 000. Les autres se sont des immigrés qui ont commencé à arriver il y a cinquante ans : des Albanais ; des Philippins, des Polonais et, depuis cinq six and, des personnes d’Afrique (anglophones et francophones).

Comment la situation des réfugiés a-t-elle évoluée depuis la dernière venue du Pape à Lesbos ?

Le pape François était venu en 2016 à Lesbos, au moment où il y avait eu une arrivée massive de réfugiés à partir de la Turquie, qui traversaient à leurs risques et périls la mer pour arriver sur l’île de Lesbos et les îles les plus proches de la Turquie.

Alors maintenant il faut bien reconnaître que le défi n’est plus exactement le même. Il n’y a plus d’arrivées massives sur ces îles. Le gouvernement grecque a essayé d’installer progressivement les réfugiés sur le continent, dans des camps qui sont aménagés.

Mais depuis quatre mois, le grand défi en Grèce c’est d’accorder une subvention à tous les réfugiés. En effet, jusqu’au mois de juillet, l’Agence des Nations Unies pour les Réfugiés (UNHCR) versait 150 euros sur une carte de crédit pour les réfugiés qui étaient à Athènes et 75 euros pour ceux qui étaient dans les îles. Or depuis deux mois il n’y a plus rien.

Se pose alors les questions : où est passée cette manne ? Qui doit la distribuer et comment ? Le UNHCR a dit que c’était à présent au gouvernement grec de gérer ça. Or depuis, on ne voit plus rien arriver. Donc la situation est dramatique pour des milliers de réfugiés qui n’ont plus un sou. Le gouvernement a dit : « C’est parce que nous transformons le système ». Mais dire cela à des gens qui attendent cette subvention comme une bouée de secours, c’est inadmissible. C’est inacceptable !

27 associations humanitaires, dont le JRS, ont fait une démarche pour en appeler à reprendre cette subvention. C’est une vraie urgence.

Le samedi 4 décembre, les jésuites vont rencontrer le pape ? Qu’attendez-vous de cette rencontre ?

Nous accueillons cette rencontre comme une invitation bien sympathique du Pape, car elle vient de son initiative. Il a dit : « il y a une communauté jésuite à Athènes : je souhaite les rencontrer ». Donc c’est vraiment une rencontre fraternelle. On ne veut pas en profiter pour arriver avec un programme de demandes. Nous sommes neuf jésuites en Grèce mais nous ne serons que sept à le rencontrer car deux ont des problèmes de santé.

Cela m’amuse aussi car en 1987, lui et moi étions présents à une « assemblée des procureurs », c’est-à-dire une réunion entre les représentants des différentes provinces jésuites. Il représentait la province d’Argentine. Mais nous n’avions alors pas échanger ensemble car à l’époque je ne parlais pas espagnol.

Quelle est la présence des jésuites en Grèce ? Quelles sont vos différentes missions ?

Notre présence s’est récemment affaiblie puisque nous n’avons plus qu’un seul jésuite polonais pour s’occuper de la communauté polonaise. Le P. Théodore Kodidis est, quant à lui, devenu l’archevêque d’Athènes. Mais nous continuons nos missions, grâce notamment à la collaboration de laïcs, notamment pour notre revue.

Nous avons également la branche grecque du JRS, qui est d’ailleurs bien structurée à partir de Bruxelles, avec des salariés et des volontaires que nous accueillons à la maison, ainsi qu’une petite communauté de religieuse.

Nous avons aussi un beau service de bibliothèque et d’archives qui a été complètement rénové. Et bien sûr nous sommes présents dans cette paroisse, qui est à majorité polonaise.